Dans quel contexte avez-vous mis sur pied ces formations destinées aux proches aidants?
J’ai été proche aidant pour mon père. En fait, c’était surtout ma mère qui l’était, mais ma sœur et moi lui donnions un coup de main. Une fois le diagnostic de SLA (sclérose latérale amyotrophique) établi, la maladie a progressé très vite. Ces quatre mois-là ont été très intenses. Au cours de cette période, nous avons reçu de l’aide du CLSC, sous forme d’équipement surtout. Cependant, nous n’avions pas vraiment accès à plus d’informations sur la maladie, sur son évolution, les changements qui allaient se produire, les soins à prodiguer et la manière de s’y prendre pour déplacer mon père…
C’est à ce moment-là que je me suis rendu compte que les proches aidants avaient des besoins. Des structures existent, bien sûr, mais les gens qui en font partie n’ont pas le temps de donner des explications ni de faire des démonstrations. Ce n’est pas dans leur mandat. Puisque je suis formateur en premiers secours, on m’avait demandé un volet destiné aux proches aidants. Si, au départ, je n’en voyais pas la pertinence, je l’ai comprise peu à peu grâce à ma propre expérience. SLA Québec m’a contacté pour offrir aux proches aidants un atelier sur les manières de déplacer les personnes souffrant de SLA, sachant que leur condition peut changer très vite.
Au cours des années, plusieurs autres organismes ont eu besoin de mes services. Étant formateur PDSB depuis plus de 10 ans, j’ai créé les ateliers pour les aidants naturels.
Qu’offrez-vous dans ces formations destinées aux proches aidants ?
Pour les proches aidants, les besoins sont énormes : lever, asseoir, entrer et sortir du bain, tourner dans le lit… Voilà autant de gestes quotidiens qui paraissent banals, mais qui peuvent devenir très problématiques, à mesure que les personnes aidées perdent de l’autonomie. L’une des formations que je dispense dure 16 heures. Les participants prennent le temps de réaliser correctement et en toute sécurité ces gestes quotidiens.
Dans un autre atelier, je leur montre les gestes de premiers secours, pour dégager les voies respiratoires d’une personne qui s’étouffe, par exemple, ce qui arrive souvent avec la SLA. Beaucoup de mythes subsistent encore – non, on ne met pas de beurre sur une brûlure! – et je m’attèle à les faire disparaître.
Pour quelles situations préparez-vous les participants?
Je pars d’un cas commun, par exemple lorsque l’on s’étouffe avec un aliment. Cela peut arriver à tout le monde. Je laisse aux participants le temps de s’exercer, puis on précise graduellement l’exemple. Que faire lorsque la personne est en surpoids ou est enceinte? Lorsqu’elle a une hernie abdominale? On va de plus en plus vers le médical et vers des sujets plus délicats à entendre. Bien souvent, les participants n’ont pas encore affronté les réalités que je leur montre, alors il faut y aller par étapes. J’essaie de les préparer au pire, en espérant qu’ils pourront réagir rapidement au moment opportun. Quand quelque chose de sérieux arrive, il y a parfois blocage : on peut figer et être alors incapable d’aider. J’essaie donc de préparer les participants à cette réaction possible, pour qu’ils ne se sentent pas coupables s’ils pensent ne pas avoir eu les bons réflexes.
Les proches aidants que vous rencontrez sont-ils uniquement des proches aidants d’aînés?
Des proches aidants d’aînés oui, mais aussi de jeunes familles avec des enfants handicapés, par exemple. J’enseigne également au personnel des camps de vacances et aux gens proposant des services de répit aux personnes vivant avec un handicap ou à mobilité réduite. Les proches aidants, quelle que soit leur situation, sont difficiles à joindre. Donc, je promeus mes programmes, j’interviens dans les organismes qui œuvrent auprès des aidants.
Mon but n’est pas de les sortir du réseau de ces organismes, mais bien d’être complémentaire à leurs actions. Si un proche aidant se blesse, on a alors deux personnes qui ont besoin de soutien. Donc, mon objectif est de former les proches aidants pour qu’ils posent les bons gestes, pour qu’ils se sentent rassurés et en contrôle lorsqu’ils aident leur proche.
En fin de compte, ma démarche repose davantage sur la prévention que sur les premiers soins. Ne pas blesser et ne pas se blesser : voilà ma philosophie.
Jacques Durand propose différents ateliers de 4, 8 ou 16 heures, selon les besoins, que ce soit en premiers soins ou en PDSB. Pour plus de renseignements sur les formations données par Jacques Durand : formationjacquesdurand.com.