Pour en finir avec la maltraitance envers les personnes proches aidantes

07 Mai 2021

Pour en finir avec la maltraitance envers les personnes proches aidantes

On reconnaît de plus en plus les divers types de maltraitance, notamment envers les aînés. Cependant, il faut savoir que la maltraitance existe également envers les personnes proches aidantes.

07 Mai 2021
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Sophie Éthier est professeure à l’École de travail social et de criminologie de l’Université Laval. Elle est également chercheuse régulière à VITAM, le centre de recherche en santé durable. Détenant une maîtrise en intervention sociale et un doctorat en gérontologie, elle possède une expertise en proche aidance.

En 2012, embauchée comme professeure à l’Université Laval, elle accepte de donner un cours sur la maltraitance des aînés, et c’est là qu’elle fait le lien : les personnes proches aidantes, qui sont souvent visées comme étant des personnes potentiellement maltraitantes envers les aînés, peuvent aussi subir de la maltraitance dans l’exercice de leur rôle.

C’est ainsi que la professeure Éthier entame des recherches portant sur la maltraitance envers les personnes proches aidantes, une première au Québec.


Qu’est-ce que la maltraitance à l’égard des personnes proches aidantes?

Tout d’abord, il faut être conscient que le rôle de proche aidant comporte des risques. Il y en a 3 principaux :

  • le risque d’épuisement, celui dont on parle et sur lequel on intervient le plus souvent;
  • le risque d’isolement;
  • le risque de maltraitance, celui sur lequel on devrait dorénavant se pencher davantage.

Ensuite, il faut connaître les 4 sources de maltraitance, volontaire ou non, soit:

  • les institutions : le manque de soutien, les délais interminables, la lourdeur administrative, etc.
  • l’entourage : les jugements portés, l’absence d’aide, etc.
  • la personne proche aidante elle-même : le non-respect de ses limites, le refus de prendre du répit, etc.
  • la personne aidée : le refus de services offerts par des intervenants (elle veut juste le soutien de la personne proche aidante), les exigences nombreuses et irréalistes, parfois à cause de sa maladie cognitive ou psychiatrique.


La maltraitance envers les personnes proches aidantes : un sujet tabou

Si l’on ne se reconnaît pas comme une personne proche aidante, il est difficile de se reconnaître comme une personne proche aidante maltraitée, nous informe la professeure Éthier.

En effet, comment aborder un sujet duquel on ne sait rien? La clé réside dans la prise de parole. Il faut en parler! Au cours de discussions, dans le cadre de ses recherches, la professeure Éthier affirme qu’il n’était pas nécessaire de creuser bien loin pour que les intervenants et les personnes proches aidantes donnent des exemples concrets de maltraitance. « Cette réalité existe, d’où l’importance d’en parler et de nommer les situations », déclare-t-elle.

D’ailleurs, il n’est pas rare de voir des personnes proches aidantes mieux comprendre leur situation après avoir saisi l’étendue de ce qui peut être considéré comme de la maltraitance : « Ce n’est pas comme cela qu’ils l’auraient nommée, mais ils reconnaissent vivre au moins l’une ou l’autre des situations données en exemple, comme le fait de ne pas se faire reconnaître comme aidant auprès de son entourage. Les gens associent beaucoup plus cette réalité à de l’indifférence plutôt qu’à de la maltraitance », précise la professeure Éthier.

Le silence fait donc écho à une méconnaissance :

  • de l’enjeu;
  • du rôle de personne proche aidante;
  • du vocabulaire.


Comment prévenir la maltraitance envers les proches aidants?

Une fois que l’on connaît cette situation, que l’on sait qu’elle peut exister, il faut tenter de la prévenir. La clé est la sensibilisation. La professeure Éthier et son équipe ont d’ailleurs élaboré une boîte à outils comprenant une affiche, un guide d’animation et des dépliants pour aider les intervenants à aborder le sujet de la maltraitance avec les personnes proches aidantes, à en discuter avec elles.

Les outils sont offerts sur le site du RANQ depuis le 28 avril 2021. Ils seront téléchargeables gratuitement. Des copies papier seront aussi disponibles, mais en quantité limitée.


Qu’est-ce que la bientraitance?

À l’instar des poupées russes, il faut imbriquer certains concepts les uns dans les autres. Il y a tout d’abord la bienveillance, qui est l’attitude de vouloir faire du bien. Ensuite, il y a la bienfaisance, qui répond à la volonté de faire du bien par des actions concrètes. Et puis, nous avons la bientraitance, plus large encore, qui englobe les deux autres. Pour être bientraitant, il faut nécessairement être bienveillant et bienfaisant. Mais la bienveillance seule n’est pas forcément signe de bientraitance. Il faut plus que cela.

La professeure Éthier et son équipe proposent d’ailleurs la définition suivante : « la bientraitance envers les personnes proches aidantes est une démarche d’accompagnement globale. Elle s’ancre dans la reconnaissance sociale des personnes proches aidantes et dans les politiques publiques. La bientraitance est la responsabilité partagée des institutions, de l'entourage, des personnes aidées et des personnes proches aidantes. Elle vise à promouvoir le soutien des personnes proches aidantes, l’écoute de leurs besoins et la valorisation de leur apport, de leurs expériences et de leurs expertises dans la vie quotidienne. En faisant la promotion d’attitudes et de comportements positifs et respectueux, la bientraitance peut prévenir l’apparition de la maltraitance à leur égard. »

« Il faut comprendre aussi que pour être bientraitant, il faut d’abord être bien traité. Par exemple, si l’on souhaite que les intervenants en santé et services sociaux soient bien traitants, ils doivent être eux-mêmes bien traités dans leur milieu de travail. Ce faisant, ils pourront être bientraitants envers les proches aidants qui, eux, pourront être bientraitants envers leur aidé. Il s’agit d’une culture globale, une vision, une pratique à adopter au niveau de la société », ajoute la professeure Éthier.

Selon la professeure Éthier, prendre soin des personnes vulnérables dans la société est une responsabilité sociale et collective. Les personnes proches aidantes ne devraient pas porter à elles seules le fardeau de s’occuper de leur aidé. En ce sens, une société proche aidante le reconnaît et offre les ressources nécessaires.

« Nous sommes tous susceptibles de nous retrouver personne proche aidante un jour. Donnons-nous les moyens collectivement de soutenir ce rôle », conclut-elle.


Ressources d’aide et d’écoute

Au Québec, plusieurs lignes téléphoniques d’aide et d’écoute sont disponibles pour soutenir les personnes qui vivent certaines problématiques telles que la maltraitance.

La Chaire de recherche sur la maltraitance envers les personnes aînées a rassemblé une liste de ressources d’aide et de services disponibles au Québec (février 2021). Vous pouvez vous y référer, peu importe que vous soyez une personne aînée ou non.

Pour toute urgence, composer immédiatement le 9-1-1.
24 heures sur 24, 365 jours par année.


Notre service Info-aidant est aussi là pour toutes les personnes proches aidantes!

Que ce soit pour discuter de votre vécu ou pour poser un geste de bientraitance à votre endroit, nos conseillères et conseillers sont là pour vous :
Par téléphone: 1 855 852-7784
Par courriel: info-aidant@lappui.org
Ce service est gratuit, confidentiel et ouvert tous les jours de 8 h à 20 h.

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